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Réalité et fiction dans la photographie ethnographique des années 1950

Danse traditionelle par la confrérie 'Bambuli' (1956)

Le musée royal de l'Afrique centrale possède une série presque complète de photographies du Centre d'Information et de Documentation du Congo Belge et du Ruanda-Urundi, mieux connu sous le nom de Inforcongo. Ce service fut fondé au début des années 50 par le Ministère des Colonies pour promouvoir une image positive de l'entreprise coloniale. Un grand nombre de photographies se rapporte aux réalisations matérielles du colonisateur, tandis que d'autres illustrent les profondes transformations économiques et sociales dans la société congolaise. La collection comporte également une série remarquable de photos de danses traditionnelles. Celles-ci sont caractérisées par la tension qui règne entre la réalité et la fiction et leur prétention ambiguë à « l'authenticité ».

Carlo Lamote et Henri Goldstein furent des photographes particulièrement productifs et primés d'Inforcongo. Avec beaucoup de zèle ils se sont consacrés entre autres à la photographie ethnographique. Inspirés par l'idéal de « l'explorateur », ils étaient sans cesse à la recherche de sujets ethnographiques intéressants. Ils étaient convaincus du fait que les traditions locales étaient appelées à disparaître rapidement et qu’il fallait donc d’urgence les fixer sur la plaque photographique.

Les danses et rituels traditionnels qu'ils voulaient « découvrir » et documenter ont toutefois souvent été organisés sur leur propre initiative. Ils étaient aidés en cela par les agents territoriaux ou par les missionnaires et ils disposaient d'un budget particulier pour sponsoriser la préparation et les représentations sur place. En vue d'assurer un enregistrement « objectif », tous les éléments qui étaient le résultat de l'importation ou de l'influence européennes furent supprimés avant de déclencher la caméra. On estimait cela nécessaire pour garantir aux images leur véritable authenticité. C'est ainsi qu'un grand nombre de danses traditionnelles n'ont pas été découvertes, mais plutôt « réinventées ». Néanmoins, les photos furent cataloguées comme documentation scientifique et sont aujourd'hui encore souvent consultées comme documents objectifs de l'époque, sans que ceux-ci fassent l’objet d’une analyse critique.